Création artistique de Noubissi Arts, Tangier, Morocco
Préface: Remarques à propos de l’écriture du rapport d’analyses du groupe régional de la Méditerranée Occidentale
Écrire ce rapport sur les développements de la route migratoire en Méditerranée Occidentale via le Maroc est une tâche complexe et nous voudrions tout d’abord partager avec l.a.e lect.rice.eur des réflexions sur le processus avant de nous pencher sur le contenu.
Il y a peu de couverture sur la situation des personnes en mouvement par les médias marocains; notamment car le gouvernement marocain contrôle la presse. Les enquêtes sur les lacunes ou les conflits d’intérêts gouvernementaux ne sont pas très bien vus au Maroc. Des enquêteu.se.r.s indépendant.e.s, des journalistes, des reporters des droits de l’homme et des militant.e.s sont sous surveillance et nous avons connaissance de plusieurs situations où les personnes ont été invitées à quitter le pays et leur matériel confisqué.
Le mouvement Hirak a débuté dans la région du Rif en 2016. Les revendications portaient sur les droits sociaux fondamentaux tels que l’éducation, les soins de santé et l’accès au travail. Au moins 17 journalistes indépendant.e.s et 400 militant.e.s ont été arrêté.e.s. Beaucoup de gens sont toujours emprisonné.e.s[1]. Le Freedom House Index qualifie le Maroc de «partiellement libre» et mentionne la répression d’acteurs non gouvernementaux, tels que l’AMDH (l’Association marocaine des droits de l’homme) et l’interdiction faite à Amnesty International de mener des recherches au Maroc[2].
Le contexte politique est une des raisons qui explique que les luttes des travailleu.se.r.s en Méditerranée Occidentale sont si invisibles. C’est pour cela qu’Alarmphone essaye de répertorier les principaux développements et incidents en Méditerranée Occidentale et ne se focalise pas uniquement sur les traversées maritimes.
Une grande partie de l’information que nous transmettons ici provient directement des activistes d’Alarm Phone qui sont e.lles.ux-mêmes en transit au Maroc. Ces points de vue de l’intérieur sont entremêlés d’informations provenant d’autres groupes et contacts militants, de contenus sur les réseaux sociaux, de communiqués de presse et d’articles de journaux. En créant le contenu de ce rapport, nous sommes conscient.e.s de certains problèmes que nous souhaitons mettre en évidence ici:
- Nous voulons rendre compte de la répression et de la précarité des personnes en transit sans victimiser les voyageu.se.r.s ou cacher leur capacité d’action. Nous voulons souligner le désespoir de ce cycle de répression sans oublier les moments forts de résistance et de victoire, les moments Boza.
- De manière générale, dans les discussions sur le régime des frontières, il est important de ne pas décrire le Maroc comme la pièce de théâtre de l’Occident, tel un État sans organisation, instrumentalisé au sein du régime des frontières européennes. Ce serait sous-estimer le pays. Il ne serait pas non plus correct d’attribuer la responsabilité exclusive des abus sur la voie de transit occidentale au royaume hachémite. Ce serait faire fi de la culpabilité et de la responsabilité de l’Union européenne.
- Nous ne voulons pas reproduire la division entre les voyageu.se.r.s sub-saharien.ne.s.et les harragas – des personnes des communautés du Maghreb – mais les agressions des harragas sont beaucoup plus cachées et difficiles à documenter. Les ressortissant.e.s marocain.e.s sont confronté.e.s à d’autres types de répression étatique que celles auxquelles sont confrontées les voyageu.se.r.s sub-saharie.nne.n.s. Bien que ce rapport se concentre sur les voyageu.se.r.s sub-saharie.nne.n.s, nous sommes conscient.e.s que près de la moitié des traversées maritimes de la Méditerranée occidentale sont effectuées par des ressortissant.e.s marocain.e.s.
- Nous essayons de décomposer notre analyse des tendances et dynamiques en incidents spécifiques. Nous sommes conscient.e.s que les reportages sur des incidents uniques de même nature peuvent sembler répétitifs, mais nous soulignons ainsi le caractère cohérent de la répression structurelle.
- Nous ne voulons pas reproduire les idées et les divisions nationalistes en terme de citoyenneté, mais nous avons parfois décidé de faire référence aux nationalités dans nos rapports afin de faciliter l’identification des personnes concernées.
Enfin, nous tenons à préciser que ces analyses s’adressent aux représentants de l’État et aux institutions (pour se prémunir), aux activistes (pour partager des informations et créer des réseaux) et aux communautés itinérantes (pour informer et donner du pouvoir d’agir). Dans le même temps, ils constituent également une archive à long terme des événements le long de la route de la Méditerranée occidentale. Écrire pour plusieurs groupes cibles à la fois est un défi, mais le fait de savoir quelles informations sont partagées, de quelle manière et avec qui; constitue un potentiel intéressant.
Sommaire du rapport:
1 Traversées par la mer et expériences AP
2 Nouvelles des régions
2.1 Tanger et le détroit de Gibraltar
2.2 Nador et les forêts
2.3 La route du Sahara occidental
2.4 Les enclaves de Ceuta et Melilla
2.5 Oujda et la frontière maroco-algérienne
3 Politique et résistance en Méditerranée occidentale
4 Naufrages et tragédies
1 Traversées par la mer et expériences AP
Le nombre de traversées en mer dans la Méditerranée occidentale continue de diminuer considérablement. Selon les données du HCR, le nombre de passages réussis est en baisse de 55% en 2019 par rapport à la même période l’année dernière. Les passages par la terre ont également diminué de 11%. Au 27 octobre, 21 366 passages maritimes et 4 968 passages terrestres ont été répertoriés[3].
Le nombre de cas Alarm Phone dans la Méditerranée occidentale est également beaucoup plus faible que l’année précédente. En août et septembre 2019, Alarm Phone a reçu des alertes provenant de 28 bateaux en détresse dans le détroit de Gibraltar, de l’autre côté de la mer d’Alboran et sur la route du Sahara occidental vers les îles Canaries. Seuls 15 bateaux ont finalement été secourus en Espagne, 12 ont été interceptés ou sont retournés au Maroc, et pour un bateau, nous n’avons pas pu suivre ni confirmer l’interception probable.
A Tanger et ses environs, de moins en moins de gens arrivent à organiser leur voyage par le détroit de Gibraltar, la répression policière empêche les Noirs de se déplacer librement dans les rues de la ville et les maisons partagées font toujours l’objet de nombreuses perquisitions. Ces jours-ci, selon nos adhérent.e.s locaux Alarm Phone, très peu de personnes «touchent l’eau», la plupart des tentatives sont déjouées par les autorités. Les opérations de police se sont également intensifiées à Nador à un tel point qu’il est devenu très difficile pour les voyageu.se.r.s de tenter de traverser.
Mais, il est important de rappeler que 2018 a été une année exceptionnelle pour la liberté de circulation en Méditerranée occidentale et que Boza en 2019 est encore plus répandu qu’en 2016 et presque au même niveau qu’en 2017:
Source: UNHCR[4]
La migration estivale de la Méditerranée occidentale a certes été maîtrisée, mais la route est encore loin d’être fermée. Il y a encore des jours où un grand nombre de passages maritimes ont lieu vers l’Espagne, comme par exemple le 2 septembre. Ce jour-là, 188 personnes ont été sauvées en Espagne par plusieurs bateaux dans le détroit de Gibraltar et la mer d’Alboran[5]. 20 jours plus tard, le Salvamento a sauvé 115 voyageu.se.rs dans la mer d’Alboran[6]. Le 29 octobre, le nombre de passag.ère.er.s a atteint un sommet avec environ 300 arrivées en moins de 24 heures[7].
En revanche, et sans doute en réponse; la route vers les îles Canaries est maintenant beaucoup plus utilisée, avec 1 489 arrivées documentées par le HCR jusque début novembre 2019[8].
Plus de voyageu.se.r.s sont également arrivé.e.s sur les îles Baléares. Le 2 septembre, 18 passag.ère.er.s ont été sauvé.e.s par un bateau de croisière. Ils ont débarqué à Majorque[9]. Le 18 septembre, 78 migrant.e.s au total ont été arrêté.e.s, après être arrivé.e.s sur six bateaux différents aux Îles Baléares[10]. En réponse, le gouvernement local a fait part à Madrid de ses préoccupations concernant un éventuel nouveau corridor de migration et a sollicité l’aide du gouvernement espagnol afin de bloquer de manière préventive cette route[11].
Ismael Furió, président de la CGT, principal syndicat des travailleu.se.r.s de Salvamento Marítimo, a condamné les changements de structure: “Désormais, rien ne se fait sans les ordres du commandement unique, qui est un organe militaire dirigé par la Guardia Civil”, a-t-il déclaré au site d’information espagnol Público. Il a ensuite expliqué: «Les ordres sont maintenant d’alerter d’abord le Maroc, puis la Guardia Civil. Nous ne sortons maintenant que si le bateau se trouve dans les eaux espagnoles… Le sauvetage est devenu un sujet de contrôle des migrations[12]». Les années précédentes, la communication entre Alarm Phone et Salvamento Maritimo permettait un espace de négociation. À plusieurs reprises, nous avons pu convaincre les autorités de secours espagnoles de sauver des bateaux en détresse dans la zone marocaine[13]. Environ un tiers des sauvetages en Espagne en 2018 ont eu lieu dans la zone de responsabilité marocaine (SAR). Cela devint presque impossible après que les officiers de SM eurent été subordonnés aux ordres de la Guardia Civil, dont l’objectif est de contrôler les frontières et non de sauver des vies.
Si les autorités marocaines sont alertées par Alarm Phone, il est encore très hasardeux de savoir si elles vont lancer une mission de secours et à quel moment. Selon Manuel Capa de la CGT, lorsque SM est informée d’un bateau qu’elle qualifie de responsabilité marocaine, l’Espagne en informe l’Etat “partenaire”, puis le Maroc prend “toutes les mesures qu’il juge nécessaires”, mais l’Espagne ne vérifie pas le résultat final. Le centre de coordination espagnol n’entre pas dans les pratiques marocaines: “S’ils n’agissent pas, personne ne le saura”, a déclaré Capa[14]. Donc, la tâche cruciale d’Alarm Phone est d’appeler et de rappeler les autorités marocaines, afin de tenter de trouver des informations sur les actions mises en place et sur le bon déroulement du sauvetage. SM ne fait que transférer des responsabilités et ne montre aucun engagement supplémentaire.
2 Nouvelles des régions
2.1 Tanger et le détroit de Gibraltar
Les mécanismes de répression, tels que les arrestations à Tanger et les déportations (et dans d’autres zones ciblées au Maroc), ciblent les voyageu.se.r.s intercepté.e.s en mer ainsi que ce.lles.ux qui vivent et travaillent au Maroc depuis de nombreuses années. Les déportations fréquentes des zones frontalières du nord vers le sud peuvent être comprises comme une méthode politique permettant de réguler et de ralentir les mouvements migratoires. Les responsables marocains gagnent ainsi du temps et ont un aperçu plus précis des routes de transit. Ce qui semble être à première vue une sélection aléatoire de destinations de déportation, avec des personnes parfois poussées à 100 kms, parfois jusqu’à 2000 kms (Tanger-Dakhla: 1 946 km) de leur emplacement d’origine, pourrait en fait être un mécanisme de contrôle conscient de l’Etat marocain. Le Maroc doit trouver un équilibre entre le “succès” de la lutte contre la migration irrégulière vers l’UE et le maintien de la pression aux frontières extérieures de l’Union européenne afin de maintenir les flux financiers vers le royaume hachémite. Les voyageu.se.r.s subsahariens en déplacement sont pratiquement bannis des centre-villes et sont donc dissimulé.e.s aux yeux du peuple marocain et européen, ainsi que des partenaires politiques. Ceci constitue une deuxième méthode de contrôle.
Cette perspective de «contrôle des flux migratoires» ne tient pas uniquement compte de la subjectivité des personnes concernées, de leur autonomie de migration, mais également des effets secondaires de cette «déportation» constante.
Les déportations perturbent les réseaux sociaux, mais d’un autre côté, les expulsé.e.s doivent se réorienter encore et encore, sans possession et souvent même sans téléphone. Cela renforce en fait les liens avec la communauté, car les gens comptent sur un soutien mutuel pour faire face à la situation.
Pour la ville de Tanger, l’ancienne plaque tournante de la migration nordique à travers le détroit de Gibraltar, les raids et expulsions à grande échelle ne sont pas nouveaux. Le quartier de Boukhalef a été si souvent expulsé, parfois avec une violence meurtrière, qu’après une expulsion massive, la plupart des ancien.ne.s résident.e.s ont quitté les lieux et ont cherché refuge ailleurs ou même à l’extérieur de la ville. (Fin 2016, le Roi Mohamed VI a lancé la deuxième campagne de régularisation des voyageu.se.r.s sans papier. Parallèlement et paradoxalement; de nombreux contrôles, arrestations et expulsions ont eu lieu dans tout le pays, et notamment des expulsions vers la frontière algérienne et le sud du pays. Les femmes et les enfants figuraient parmi les expulsé.e.s, ce qui était beaucoup moins le cas les années précédentes. En 2017, pour la première fois depuis 2005, des expulsions ont eu lieu non seulement dans l’État marocain, mais également dans les régions frontalières[15]. Cette dynamique s’est accélérée en 2018 et maintenue tout au long de l’année 2019, comme nous en avons fait état dans nos publications régulières.)
Le 9 août, la police a arrêté un sub-saharien devant un hôpital de Tanger. Selon nos contacts, l’homme en question souffrait d’une maladie cardiaque et avait sur lui ses documents médicaux. Les autorités l’ont toutefois arrêté et déporté vers une destination inconnue.[16] Ce n’est pas la première fois que les autorités marocaines enferment des personnes malades dans une cellule surpeuplée, ou les déportent dans des bus vers le sud. Nous condamnons fermement le racisme structurel au sein de la police ainsi que leurs actions violentes, comme nous le faisons pour toute pratique d’arrestation et de déportation!
Le 11 août, deux jours plus tard, trois membres d’AP, malgré le fait qu’e.i.lle.l.s soient en possession de leurs papiers, ont été arrêté.e.s et déporté.e.s vers le sud. Tou.te.s avaient déjà été arrêté.e.s et repoussé.e.s vers le sud plusieurs fois, comme nous l’avons indiqué dans des rapports antérieurs. La répétition de ces mécanismes de répression nous rend “habitué.e.s” aux messages de nos camarades rapportant ce genre de faits depuis leurs cellules ou leurs bus de déportation. C’est inquiétant.
Le 30 août, un citoyen des Etats-Unis dénonce sur Twitter l’arrestation abusive qu’il a subi au Maroc en mars de cette année. Malgré sa résistance, il a été arrêté et emmené avec environ 30 voyageu.r.se.s subsaharien.ne.s vers le sud, à Bni Mellal. Cet acte était basé uniquement sur le fait qu’il est noir de peau. Son témoignage est devenu viral sur internet.[17] Cet exemple illustre une fois de plus le racisme structurel et les pratiques de profilage racial de la police marocaine.
Des informations faisant état d’opérations de police violentes ont été rapportées pendant toute la période couverte par le présent rapport :
Tanger est l’ancien centre de migration et point de départ des voyageu.r.se.s subsaharien.ne.s qui tentaient de rejoindre l’Europe par le détroit de Gibraltar, qui fait 14 kms de long. De nos jours; vivre à Tanger relève du harcèlement quotidien pour les Noir.e.s qui risquent d’être arrêté.e.s par la police à tout moment; à la maison, dans les cafés, dans la rue, au marché, et qui risquent d’être attaqué.e.s; même de jour, par des gangs et des terroristes, et aussi par des individus isolés.
Les tentatives de traversées par les voyageu.r.se.s subsaharien.ne.s sont beaucoup moins nombreuses, car il n’est pas facile d’organiser des passages et le littoral est fortement militarisé. Même si les voyageu.se.r.s pouvaient atteindre l’eau, la plupart des bateaux seraient interceptés par la marine marocaine, l’engagement espagnol en matière de recherche et de sauvetage ayant considérablement diminué.
Les ressortissant.e.s maghrébi.n.ne.s ont différentes formes et possibilités d’organisation et parviennent à franchir de temps à autre la frontière maritime la plus au sud de l’Europe. Quelques voyages vraiment remarquables de voyageu.se.r.s courageu.ses.x aboutissent à une victoire, Boza ! Le 5 septembre, un pêcheur a repéré 2 personnes en détresse dans un minuscule canot pneumatique en train de se battre avec les vagues dans le détroit de Gibraltar. Il a alerté l’organisation de secours espagnole Salvamento Marítimo et a attendu à proximité du bateau jusqu’à l’arrivée des moyens de sauvetage.[18] Parmi les autres passages remarquables, citons le convoi de 59 voyageu.se.r.s transporté.e.s par 7 femmes en Espagne, sauvé le 3 août, et le nombre incroyable de 51 mineur.e.s dont un petit garçon (tou.te.s des ressortissant.e.s du Maghreb).[19]
2.2 Nador et les forêts
Le nombre de tentatives de traversée à partir de Nador a également considérablement diminué au cours des derniers mois, de même que le nombre de voyageu.r.se.s subsaharien.ne.s séjournant dans les forêts aux alentours de la ville. Néanmoins, la répression et la présence militaire s’intensifient encore, les forces marocaines installant même des bases permanentes dans les forêts. L’une de ces bases se trouve à Bolingo. Ils essaient, par leur présence constante, de dissuader les voyageu.se.r.s de construire de nouveaux camps dans les forêts. Les raids et les opérations de police se sont intensifiés au cours des deux derniers mois, les forces marocaines patrouillant jour et nuit dans les forêts. Le terrain montagneux, constitué par des rochers et des fissures, constitue un piège mortel pour les personnes qui fuient des assaillants armés en pleine nuit.
La situation dans la forêt témoigne de l’intensification des attaques que doivent subir les voyageu.se.r.s en transit au Maroc. C’est un véritable combat pour la liberté de mouvement. Vous devez déjà vous battre pour atteindre le littoral juste pour tenter de vous embarquer dans le voyage risqué à travers la mer. Un membre local de l’AP qui a vécu de nombreuses années dans la zone a décrit la forêt de Bolingo telle qu’elle se présente maintenant comme un «champ de bataille», un champ de bataille caractérisé par des pillages, des arrestations, des refoulements et des déportations. Le journal “El Faro de Ceuta” cite des militant.e.s qui parlent d’une “guerre” totale contre les voyageu.se.r.s, tant dans les zones frontalières que dans d’autres régions du Maroc.[20]
Les personnes en transit dans les forêts autour de Nador sont loin du regard du public. Sans presse indépendante rapportant des informations sur cette situation, ce sont les acteurs locaux non-gouvernementaux et surtout toutes les personnes qui sont personnellement confrontées à la violence policière qui jouent un rôle essentiel dans la communication d’informations, de témoignages et d’images. Malgré leur propre précarité, beaucoup de voyageu.se.r.s ont créé des pages sur les réseaux sociaux pour diffuser des incidents, chercher des amis ou de la famille disparue et plus généralement partager des informations. Les réseaux sociaux sont devenus des plateformes essentielles pour la puissance d’agir et la dénonciation des abus. L’AMDH (Association Marocaine des Droits Humains) de Nador documente minutieusement et critique vivement les opérations de la police sur leur page Facebook et d’autres réseaux sociaux, publiant des images et revenant ponctuellement sur des actes violents spécifiques.
Un camp détruit après un raid policier. Dénonciation sur Facebook. Source: AMDH Nador
Des vidéos d’une opération policière sont publiées par l’AMDH et visionnables ici.
La nuit du 7 au 8 septembre, les forces marocaines ont mené un rafle de grande ampleur dans la forêt de Bolingo, où environ 2000-3000 subsaharien.nne.s vivent actuellement dans des camps de fortune loin des regards des autorités, mais sous la menace constante d’expulsion et d’être arrêté.e.s.[21] Pendant le raid du 7 septembre, Anssou Keita, citoyen Guinéén, a été assassiné par des coups de matraque lorsqu’il a résisté à un agent marocain qui tentait de voler son téléphone portable. Huit autres personnes ont été gravement blessées. Les camarades d’Anssou, qui protestaient près de son corps, ont tous été arrêtés et enfermés dans une prison à Akremane (à 20 kilomètres de Melilla) que les forces marocaines ont rouvertes dans ce but précis.
Dans cet établissement, les 200 voyageu.se.r.s arrêté.e.s ont été enfermé.e.s dans une salle surpeuplée, dans l’attente de leur expulsion vers leur pays d’origine. Des contacts locaux font valoir que les autorités marocaines tentent de dissimuler l’incident, ce qui explique l’arrestation des témoins oculaires, parmi lesquels des femmes et des enfants.
Omar Naji, président de l’AMDH à Nador, précise: “Il s’agit d’un centre de détention illégal. Il n’existe pas de cadre juridique au Maroc qui permette l’ouverture de ce type de centre d’expulsion”. Naji a déclaré, protestant parce que ni lui ni personne de son association n’ont été autorisés à entrer dans la “prison” d’Arekmane pour vérifier la situation des voyageu.se.r.s, “c’est un lieu où des personnes sont kidnappées, sans possibilité pour les détenu.e.s d’avoir accès à un avocat. L’an dernier, nous avons pu constater que plus de 2 000 immigrant.e.s avaient été capturé.e.s dans les forêts au cours de plus de 340 raids. Ce.lles.ux qui n’ont pas pu rester, plus de 9 000, ont été emmené.e.s en bus au sud du pays ou la frontière algérienne et y ont été laissés allongé.e.s”.[22]
Dans le cas des voyageu.r.se.s subsaharien.ne.s arrêté.e.s au centre de détention d’Arekmane après la mort d’Anssou Keita, certains voyageu.r.se.s, dont certain.e.s avaient des permis de séjour, ont été déporté.e.s vers leur pays d’origine (Côte d’Ivoire, Mali et Guinée) via l’aéroport de Casablanca. Un groupe de 14 personnes a été déporté mardi 10 septembre vers la frontière algérienne (région de Touissit). Depuis lors, leurs allées et venues sont inconnues. Le reste du groupe est toujours détenu au centre de détention d’Arekmane.[23]
Il a été signalé que, fin septembre, les ambassadeurs de divers pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre étaient arrivés à Nador pour identifier les ressortissant.e.s de leurs pays respectifs afin de faciliter les expulsions. Selon nos contacts locaux, deux personnes de nationalité ivoirienne ont été «faussement» déportées au Mali dans le cadre de ces procédures d’identification. Nous n’avons pas pu trouver de publication officielle ni de statistiques sur les déportations vers les pays d’origine au Maroc, mais selon nos observations, les chiffres ont considérablement augmenté en 2019.
Surtout dans la forêt de Bolingo, mais aussi à Selouane, nos contacts font état de raids intensifiés. À la mi-septembre, environ 50 personnes ont été arrêtées au cours d’une opération, dont 12 voyageurs arrêtés à un barrage routier érigé par les forces marocaines. Dans la forêt de Bouyafar, une femme de nationalité guinéenne est décédée le 2 octobre. Ses camarades attribuent sa mort à la maladie et aux conditions de vie. Ils ont dû laisser son corps dans le camp et se sauver avant que les autorités n’arrivent pour enquêter plus avant. Elle est une personne de plus à qui on refuse même un enterrement digne, victime de cette frontière meurtrière.
Malgré la situation de «champ de bataille», les gens parviennent toujours à traverser. La route en direction de l’Espagne à travers la mer d’Alboran n’est pas fermée et les développements futurs restent à envisager.
Régulièrement, des bateaux rejoignent l’Espagne via cette route. À titre d’exemple, le 28 août, 132 bozas provenant de 2 bateaux[24]; le 9 septembre, 79 personnes (67 hommes, 10 femmes et 2 mineur.e.s) ont été secouru.e.s en Mer d’Alboran[25]; et le 17 septembre, 80 personnes ont été secouru.e.s par deux bateaux du Service de Sauvetage Maritime Espagnol et ont été déposé.e.s en Espagne.[26] A la fin septembre, un bateau avec 68 passag.er.ère.s subsaharien.ne.s dont 48 femmes serait arrivé en toute sécurité à Melilla.
2.3 Sahara occidental: La route vers les îles Canaries
Les arrivées aux îles Canaries sont en constante augmentation par rapport aux années précédentes. Jusqu’à fin octobre, le HCR comptait 1 470 arrivées avec succès dans les îles espagnoles.[27]C’est environ 21% de plus qu’à la même période en 2018.[28] L’augmentation du nombre de personnes passant par les Canaries est probablement liée à la répression généralisée des traversées par les routes du nord – le même phénomène était visible après l’installation du système de surveillance externe intégré (SIVE) dans le détroit de Gibraltar en 2002, qui empêchait les traversées dans cette zone, et par conséquent conduit à une augmentation des traversées via la route du Sahara Occidental.
Rien qu’au cours du premier week-end de septembre, 6 bateaux ont atteint les îles Canaries, transportant au total 113 personnes. Les distances à parcourir depuis certaines plages de départ sont plus longues qu’entre le nord du Maroc et le continent espagnol. Le 2 septembre, des marins turcs ont secouru un bateau de voyageurs-euses à quelque 60 milles nautiques au large de l’île de Grande Canarie.
Le 14 septembre, Alarm Phone a été alerté d’un bateau parti de Dakhla, tout au sud du Sahara occidental, à 2 heures du matin. C’est à dire que les voyageurs-euses tentaient la traversée par le plus long chemin possible sur cette route. De Dakhla à l’île la plus au sud, il y a environ 270-280 miles nautiques à couvrir, soit environ 500 kms, à travers l’océan. C’est impossible de pagayer, et les voyageurs-euses doivent compter entièrement sur leur moteur. La couverture téléphonique est également très limitée, de sorte qu’il est pratiquement impossible de suivre les bateaux via les GPS des smartphones ou de rester en contact avec elles et eux de quelconque manière. Dans le cas du 14 septembre, nous avons informé Salvamento Marítimo à Las Palmas, mais les 19 personnes à bord ont dû passer plus de 40 heures en mer avant d’être finalement secourues. Parfois, malgré les conditions difficiles, les bateaux parviennent à atteindre les îlots de leur propre force. C’est ce qui s’est produit le 17 septembre quand un groupe de 20 voyageurs-euses a navigué toute la traversée avec succès. Mabrouk ! Bienvenue en Europe !
Mais les interceptions et les tragédies en mer sont aussi une réalité sur la route du Sahara occidental. Le 11 octobre, 82 voyageurs-euses ont été intercepté-e-s par la Marine royale marocaine à la pointe de Lakraa, au nord de Dakhla. Le même jour, deux corps ont échoués sur la côte d’Oum Lbair. Il s’agissait d’un enfant et d’un adulte d’origine subsaharienne.
Au Sahara occidental, les voyageurs-euses souffrent également des violences policières et des politiques d’expulsion. Le 23 septembre, depuis l’intérieur d’un centre de détention à Dakhla, un groupe de 36 voyageurs-euses a réussi à contacter un membre de l’AP. Parmi eux il y avaient 18 femmes et 2 enfants. Ils-elles ont expliqué qu’ils-elles avaient été intercepté-e-s en mer deux jours auparavant, et, qu’ils-elles étaient depuis, maintenu-e-s au centre dans des conditions insoutenables. Nous avons informé les groupes d’activistes locaux et nous avons essayé de rester en contact avec les voyageurs-euses. Le lendemain, une des femmes nous a informés qu’elle avait été libérée avec les autres femmes, mais qu’elle envoyait un texto à partir d’un bus de déportation dont elle ne connaissait pas la destination. Sous la pression des militants locaux, la plupart des hommes ont également été libérés par la suite, mais un Camerounais et deux Sénégalais ont été retenus pour des raisons inconnues. Ils ont été déportés vers leur pays d’origine le vendredi 4 octobre.
Le 30 septembre, la police a perquisitionné des maisons de voyageurs-ses à Dakhla. “Ils ont arrêté 50 personnes, les ont emmenées à la police, les ont photographiées, puis ont relevé leurs empreintes digitales “, a rapporté un militant local. “Celles-Ceux qui avaient un passeport étaient séparé-e-s de celles-ceux qui n’en avaient pas. De 17h à 3h du matin, ils-elles ont été gardé-e-s au commissariat des Forces auxiliaires marocaines, puis 12 d’entre eux, dont une femme, ont été conduits dans un centre de détention. D’après mes sources, les détenteurs-rices de passeport ont été libéré-e-s, mais leurs passeports ont été confisqués.”
Le militant Babacar de Laayoune résume la situation au Sahara Occidental dans le Dossier Libia (Lybie?) : “Aujourd’hui, c’est [la situation des voyageurs-seuses] de plus en plus difficile : au cours des 3 dernières années, suite aux accords avec les Etats européens, des milliers de déporté-e-s sont arrivé-e-s [déporté-e-s du Nord Maroc]. La police marocaine leur vole tout et il leur est de plus en plus difficile de trouver un logement. Pour avoir un toit au-dessus de leur tête, ils-elles doivent s’adapter à vivre en très grand nombre dans des maisons où les conditions d’hygiène sont, pour le moins, précaires.” Il estime qu’actuellement environ 1500 voyageurs-euses subsaharien-ne-s vivent à Laayoune, beaucoup d’entre eux-elles dans la rue. Parmi eux figurent un grand nombre de femmes, qui sont les plus exposées à la violence et à l’exploitation, et des mineurs non accompagnés, dont beaucoup entre 14 et 15 ans, qui sont victimes d’exploitation par le travail. Notre camarade souligne également le fait que l’un des plus gros problèmes est que ceux qui sont sans papier, qu’il s’agisse de femmes ou d’hommes, n’ont même pas le droit de porter plainte. S’ils le faisaient, ils et elle seraient immédiatement emprisonné-e-s. Et, en conséquence leurs exploiteurs restent impunis et libres.
Babacar explique plus en détail : “Si vous êtes au sud, ils vous emmènent au nord, si vous êtes au nord, ils vous emmènent au sud. Ils font tout ce qu’ils peuvent pour empêcher les gens de partir, les éloignant des zones frontalières. Quand la gendarmerie vous contrôle, elle vous arrête et prend vos empreintes digitales. De temps en temps, elle renvoie 4 ou 5 personnes dans leur pays d’origine, mais ça coûte trop cher de le faire avec tout le monde. Tou.te.s les autres sont transféré.e.s en bus dans des zones éloignées de celles d’où ils avaient l’intention de partir pour “l’Europe convoitée”, comme une sorte de demi-refoulement, prenant argent, sacs et tout ce qu’ils trouvent. Parfois, celles-ceux qui ont assez d’argent peuvent acheter leur liberté[…]”. A Laayoune, la prison pour les candidat-e-s à la traversée est une ancienne école : les gens sont tous ensemble dans les anciennes salles de classe, généralement pour un maximum de 15 jours. Puis ils-elles sont jeté-e-s à nouveau dans la rue où ils-elles essaient d’organiser à nouveau leur départ.
Voyager vers le nord, mais aussi vers Laayoune, devient de plus en plus compliqué, car les compagnies de bus refusent l’embarquement aux voyageurs-euses subsaharien-ne-s sans permis de séjour. Le 29 octobre, des affiches apposées dans plusieurs bureaux d’une grande compagnie d’autobus au Maroc, CTM, prouvent le fait connu depuis longtemps que les autorités marocaines sont derrière cette pratique raciste, et qu’elles insistent pour que les compagnies d’autobus procèdent au profilage racial :
Source: AP Activist
Malgré les multiples témoignages sur l’affiche en question par des individus et des associations subsaharien-ne-s, CTM a nié la publication du dit document, mais, selon le journal Yabiladi, les agents de CTM ont confirmé que ces notes reflétaient bien la politique de l’entreprise. Reste à savoir combien d’autres entreprises feront de même.
Bien que nous ayons cité des perspectives peu encourageantes, nous ne voulons certainement pas oublier que cette lutte est aussi couronnée de moments de succès portés par une prise d’autonomie. Le nombre élevé d’arrivées aux Canaries prouve que la migration ne peut être contenue, et que les réseaux de solidarité, à la fois organisés et spontanés, ainsi que les actes ponctuels de solidarité au sein des communautés en transit, et entre celles-ci et la population locale sont des liens puissants et que ne peut détruire la répression d’Etat.
2.4 Les enclaves : Ceuta et Melilla
Pour Ceuta et Melilla, au 20 octobre, le HCR[29] avait enregistré 5 832 entrées irrégulières. Les arrivées par voie terrestre ont diminué de 11 % par rapport à 2018[30], mais certains “sauts” avec des issues positives ont eu lieu pendant la période couverte par le présent rapport.
Melilla
Le 19 septembre, 26 voyageurs-euses ont franchi avec succès les barrières de Melilla. Le reste de ce groupe de 60 personnes a été arrêté par les forces marocaines. C’était le deuxième saut collectif des clôtures de Melilla cet été : en juillet, environ 200 personnes ont tenté de franchir la clôture, mais seulement 50 ont réussi.[31]
Les traversées maritimes vers Melilla se poursuivent aussi : au cours de la dernière semaine d’août, seulement 6 bateaux sont arrivés sur l’îlot espagnol Chafarinas qui est situé à environ 1,9 miles du Maroc et 27 miles de Melilla. Le 25 août, un bateau qui arrivait sur cet îlot transportait 67 personnes, avec ces nombres remarquablement élevés de 41 femmes et de 15 enfants[32].
Le 19 septembre, un bateau Zodiac transportant des ressortissant-e-s syrien-ne-s a chaviré près de la côte marocaine près d’Arekmane, à la périphérie de Nador. Leur bateau aurait heurté les rochers de la plage d’Arekman. L’un des hommes a été transféré par les forces auxiliaires à l’hôpital dans un état critique[33]. Il est ridicule que le bureau officiel de l’asile à la frontière de Melilla ne soit pas accessible, et que, par conséquent, même les ressortissant-e-s syrien-e-s aient à traverser par la mer ou à sauter par dessus les barrières.
Ceuta
A Ceuta, comme ailleurs, la situation est de plus en plus difficile dans toutes les différentes zones de passage vers et depuis l’enclave espagnole.
Le 30 août, quelque 155 personnes ont réussi à franchir les barrières du Benzu-Benyunes, à Ceuta, dans une tentative collective d’atteindre l’Espagne par la frontière terrestre. Environ 8 d’entre eux-elles ont été pris au piège pendant quelques heures au sommet de la clôture de barbelés, la police les a attendus au sol et les a finalement repoussés au Maroc[34]. À l’aide d’une grue, ils ont été sortis de force de la clôture un par un et, bien qu’ils se trouvaient déjà sur le sol espagnol, ont été remis aux autorités marocaines.[35]
Des images vidéo du journal ” El Faro de Ceuta ” montrent les blessures d’un grand nombre de personnes qui ont réussi à échapper aux autorités, certaines souffrant gravement de brûlures aux yeux causées par les gaz lacrymogènes[36].
C’est le premier grand “saut” depuis l’entrée de 116 personnes le 22 août dernier. Les 116 ont été renvoyé-e-s au Maroc après avoir passé plus de 24 heures sur le sol espagnol. C’est le résultat de l’accord de réadmission de 1992, entre le Maroc et l’Espagne, qui permet l’expulsion immédiate des ressortissant-e-s de pays tiers qui ont franchi illégalement la frontière espagnole.[37] Avec cette déportation collective contestée à l’esprit, les 155 personnes craignaient d’être renvoyées et beaucoup ont donc essayé de demander l’asile immédiatement.
Finalement, les 155 ont réussi à atteindre le Centre d’accueil du CETI, évitant une ” déportation à chaud ” directe, même si c’est ce qui est arrivé à leurs camarades qui étaient coincé-e-s sur le grillage. Néanmoins, le ministère espagnol de l’Intérieur a rejeté la plupart des demandes d’asile et de protection internationale. Nos contacts locaux estiment que seulement une soixantaine de demandes de protection internationale ont été acceptées. Pour les autres, le ministère espagnol de l’Intérieur doit attendre un accord de retour du Maroc dans le cadre de l’accord de réadmission mentionné ci-dessus. Fin septembre, aucune décision finale n’avait été rendue publique et les voyageurs-euses concerné-e-s attendaient toujours dans le vide.[38]
Grande-Marlaska continue de déclarer que les barrières en fil barbelé seront retirés des clôtures espagnoles avant la fin de cette année.[39] Mais lorsqu’il s’agit de l’augmentation concomitante des barrières sur la partie marocaine de la zone frontalière, Marlaska affirme simplement : “Je répète que nous respectons absolument la souveraineté des autorités marocaines pour déterminer son périmètre frontalier”.[40]
Dans le même temps, Vox, le parti d’extrême droite, milite pour la construction de murs en béton autour de Ceuta et Melilla et pour que la police aux frontières soit autorisée à utiliser des équipements anti-émeutes, tels que des balles en caoutchouc et des pistolets électriques[41].
Cela rappelle les événements du 6 février 2014, lorsqu’au moins quatorze voyageurs-euses qui tentaient de contourner la barrière à la nage ont été assassiné-e-s par la Guardia Civil espagnole, qui a tiré des balles en caoutchouc et des gaz lacrymogènes sur les nageurs-ses. Les registres officiels comptaient 14 victimes. Mais nos amis et camarades qui faisaient partie des plusieurs centaines de personnes qui, collectivement, avaient tenté de témoigner pour aller au delà du rapport écrit à la frontière, ont signalé que beaucoup d’autres ont disparu. Seuls 23 voyageurs-euses ont réussi à atteindre le rivage espagnol dans le chaos mortel qui s’est déroulé à Tarajal, mais ils ont été immédiatement repoussé-e-s au Maroc.
Après deux tentatives du même tribunal de classer l’affaire, le chef du tribunal d’instruction de Ceuta poursuit actuellement 16 agents de la Guardia Civil pour homicide, négligence grave et refus d’aide durant ce jour horrible.[42] Le 2 octobre, le gouvernement espagnol a répondu à l’accusation en défendant ridiculement qu’il n’y aurait “pas eu de mort sur la rive espagnole de la mer”. Les avocats, dans une étrange compréhension de la loi, affirment en outre que “les 23 immigrants qui ont accédé à la plage ceutí del Tarajal, soit par leurs propres moyens, soit avec l’aide des services maritimes, l’ont fait en parfaite santé, et pour cette raison pouvaient être renvoyés immédiatement à la frontière”.[43] Un ami d’Alarm Phone faisait partie des voyageurs-euses qui ont été repoussé-e-s. La lecture de cette déclaration nous met en colère. C’est ridicule et macabre d’attribuer une “parfaite santé” à ceux qui venaient tout juste d’échapper à l’enfer en mer, qui avaient reçu des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc autour d’eux dans l’eau, et qui avaient vu des amis se noyer et se battre pour survivre.
Pour les avocats du gouvernement, l’action des agents était “proportionnée” car “les moyens anti-émeutes avaient été déployés, d’abord pour contenir, puis pour prolonger la frontière physique entre Ceuta et le Maroc, le long de la ligne de mer, et ensuite pour orienter les immigrant-e-s, qui avaient atteint les eaux espagnoles, vers l’espace sécure de la plage, et ainsi les protéger, en les empêchant de nager vers le large”. Cette défense, publiée par El Diario, est tout aussi ridicule. Il est incroyable qu’ils proposent aux policiers de tirer des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc pour ” guider ” les voyageurs-euses ” en toute sécurité ” en direction de la rive. Ce serait un être humain bien étrange qui aurait besoin de ce genre de conseils pour pouvoir faire la distinction entre la haute mer et une plage bien visible.
Nous continuerons d’assurer le suivi des procédures judiciaires et d’exiger que justice soit rendue pour nos ami.e.s et camarades assassiné.e.s….
Le 15 octobre, un autre tribunal a rendu un verdict que nous condamnons fermement :
La Cour provinciale de Cadix à Ceuta a infligé la première peine à 9 des 602 voyageurs qui avaient franchi la clôture de Ceuta le 26 juillet 2018. Ils risquent une peine d’un an et six mois de prison, pour avoir prétendument organisé le saut[44]. “La population a l’habitude d’entendre le mot immigration suivi de crime organisé et d’autres crimes, et cette phrase renforce une fois de plus ce discours, car elle lie la migration irrégulière à la criminalité”, souligne Apdha, La Asociación Pro Derechos Humanos de Andalucía, qui critique vivement ce verdict[45].
Même si les voyageurs parviennent à se rendre à Ceuta en toute sécurité, ils ne peuvent pas continuer à voyager. Reduan MJ, activiste d’Alarm Phone, rapporte : “Le désespoir des voyageurs-euses algérien-ne-s et marocain-e-s qui résident actuellement et depuis de nombreux mois dans le centre d’accueil Ceti grandit. Beaucoup d’entre eux-elles ne reçoivent pas la “salida”, c’est à dire les papiers de transfert vers le continent espagnol, avant 2 ou 3 ans. C’est pourquoi ils -elles sont obligé-e-s d’essayer d’atteindre la péninsule espagnole par des itinéraires dangereux et illégaux, c’est-à-dire par le port en caravanes, camions ou bateaux. Il y a aussi des pateras (canots pneumatiques) qui partent de Ceuta. De nombreuses tentatives de traversée sont déjouées par la police portuaire, et de nombreux voyageurs-euses ont été arrêté-e-s au cours de ces tentatives. Les mécanismes de sûreté et de contrôle dans la zone portuaire ont été fortement renforcés récemment. Ce sont surtout les mineur-e-s qui sont expulsé-e-s de la zone portuaire avec toutes sortes de pressions de la part de la police”, rapporte Reduan. Le désespoir a conduit à la tentative de suicide d’un Marocain qui a tenté de se pendre le 12 octobre au CETI. Il n’a été sauvé que grâce aux actions de ses colocataires. L’homme a été transféré à l’hôpital et a survécu[46].
Les mesures de répression comprennent les expulsions : 14 000 mineur-e-s marocain-ne-s entré-e-s illégalement en Espagne seront bientôt expulsé-e-s. Plusieurs sources indiquent que les deux États sont parvenus à un accord pour que ces mineur-e-s soient renvoyé-e-s chez eux par vagues successives. Ce partenariat a été demandé par les responsables de Ceuta et Melilla, qui ont exprimé à plusieurs reprises leurs préoccupations concernant la pression migratoire[47].
2.5 Oujda et la zone frontalière maroco-algérienne
La ville d’Oujda, située au nord du Maroc, à la frontière de l’Algérie, est également un point d’entrée pour les voyageurs -euses optant pour la ou les routes de la Méditerranée occidentale vers l’Europe. En outre, c’est aussi une base pour celles et ceux qui sont las des répressions et des nombreux contrôles au Maroc et qui décident de poursuivre leur route vers la Libye afin de tenter leur chance par la voie de la méditerranée centrale. La frontière est officiellement fermée depuis 1994. Les passages sont très dangereux, avec un énorme fossé et des clôtures à franchir. Une mafia locale facilite les passages et, dans de nombreux cas, abuse du pouvoir que lui donnent le désespoir des voyageurs-euses et de la fermeture officielle de la frontière.
Oujda et l’Algérie ont été pendant de nombreuses années les destinations désignées pour les refoulements effectués par l’Etat marocain. En 2015, cependant, les destinations avaient été changées et avaient pris la direction de la frontière du Sahara occidental et des villes comme Tiznit dans l’extrême sud de l’Etat. Récemment, Oujda semble de nouveau être la destination de choix pour les refoulements. L’intention pas si subtile est de pousser certain-e-s voyageurs-ses à quitter le Maroc pour continuer à chercher leur chemin vers l’Europe mais depuis ailleurs. La zone frontalière algéro-marocaine est la plus meurtrière en hiver, car le froid et le fossé que les voyageurs-euses doivent traverser sont une combinaison dangereuse : le 22 octobre, le corps d’un homme subsaharien de 30 à 40 ans a été retrouvé du côté marocain de la frontière, probablement mort à cause du froid et de la fatigue. C’était le deuxième corps retrouvé en une semaine.
Les refoulements et la dangereuse situation à la frontière ne sont pas les seules préoccupations à Oujda. Dans la ville même, les opérations de police continuent d’empêcher les voyageu.se.rs de se reposer et d’organiser leurs prochaines étapes de leur exil en toute quiétude. Au cours de la période couverte par le présent rapport, plusieurs opérations de police de grande envergure ont été menées, principalement dans le quartier d’Andalouse, comme par exemple le 11 août, où un groupe important de personnes a été forcé de monter dans des bus à destination inconnue. Le 20 septembre, les autorités ont pénétré dans 4 maisons où des voyageu.se.r.s subsaharien.ne.s résidaient et ont détruit tous leurs biens. Le 23 septembre, 92 personnes ont été arrêtées au cours d’une opération majeure, dont 23 mineur.e.s. 23 personnes ont ensuite été refoulées vers la frontière algérienne le même jour.
Divers témoignages de déportations forcées vers la zone frontalière algérienne au sud-est d’Oujda ont été répertoriées. Une personne a rapporté à l’AMDH qu’elle avait été interceptée en mer lors d’une tentative de traversée dans le détroit de Gibraltar le 15 septembre. Elle faisait partie d’un groupe de 12 voyageu.r.se.s qui ont ensuite été déporté.e.s à plus de 700 kms d’Oujda. Arrivé.e.s là-bas, ils ont dû passer la nuit dans une caserne et ont ensuite été conduits de force et violemment par des soldats jusqu’à la frontière algérienne.[48]
On ignore si les forces algériennes sont complices de ces retours forcés, mais le groupe de Tanger n’a pas été arrêté par les forces algériennes à son arrivée, ce qui laisse supposer que les forces marocaines ont agi seules et que le retour n’a pas été coordonné avec l’armée algérienne.
Nous ne pouvons pas élargir la portée de notre analyse en rendant compte de manière détaillée de la situation en Algérie, mais il convient de mentionner que lors de leur arrestation en Algérie, les voyageu.se.r.s risquent l’expulsion plus au sud, vers le Niger et le désert. Ces déportations en cascade créent une sorte d’enchainement expulsant et entraînant des personnes de la côte méditerranéenne au milieu du désert du Sahara. Le résultat est très dangereux. Les déporté.e.s se retrouvent sans provision de base au milieu de nulle part dans le désert. Il convient également de mentionner que les conditions dans les camps de détention algériens sont horribles. Le 9 août, nous avons reçu des images d’un camp de détention situé à Tlemcen, un village algérien situé près de la frontière marocaine, où environ 50 personnes originaires de la région du Sahara avaient été arrêtées à l’époque, dans l’attente de leur expulsion vers le Niger.[49]
Mais il y a aussi des histoires stimulantes à raconter. Depuis plus d’un an, Alarm phone Oujda est en contact avec les familles de voyageu.se.r.s marocain.e.s disparu.e.s. À l’initiative de l’AP, les familles marocaines se sont réunies à plusieurs reprises pour créer des synergies, partager leurs expériences et organiser des événements commémoratifs. Ce processus est très important pour les familles qui ne veulent pas que leurs enfants disparu.e.s soient oublié.e.s. Les traversées continuent également depuis cette partie du Maroc, bien que beaucoup soient toujours mortelles:
Le 16 septembre, un naufrage a eu lieu sur la côte algérienne, à la pointe d’Oran. Sur un groupe de 16 personnes, tou.te.s ressortissant.e.s marocain.e.s, seul.e.s 8 ont survécu. 5 personnes ont été porté.e.s disparu.e.s en mer et 3 cadavres ont pu être retrouvés dans le canot pneumatique Zodiac, parti du Maroc vers la côte espagnole pour se diriger ensuite vers l’Algérie.
Le 25 septembre, enfin, après la pression exercée par les familles et les associations de leur ville natale, Taourirt, et différentes ONG dont Alarm Phone Oujda, les trois corps ont été rapatriés par la frontière terrestre. Le poste frontière Zouj Bghal entre Oujda et Magnia a été ouvert à cet effet. Des représentant.e.s d’ONG s’étaient rendu.e.s à Oran pour négocier le rapatriement et les autorités algériennes ont accédé à leurs demandes.[50]
Cette ouverture à court terme de la frontière algéro-marocaine a été un moment historique pour la région.
En Algérie, les harraga reprennent la mer. Nos contacts locaux rapportent qu’après plusieurs mois de calme, «le phénomène de l’émigration illégale est de retour en force». Plus de 500 personnes, jeunes et moins jeunes, même des mineur.e.s et des femmes, ont tenté en août et septembre d’atteindre l’autre côté de la Méditerranée par bateau. Le numéro de téléphone d’alarmphone est encore à peine connu des harraga algérie.nne.n.s. Nous essayons donc pour l’instant de suivre l’évolution de la situation et de collecter plus d’informations.
Selon le ministère de la Défense, des dizaines de tentatives d’émigration des côtes de Boumerdès, Tipasa, Oran, Mostaganem et Annaba ont été enregistrées. En septembre, 382 harraga ont été interceptés, 7 corps ont été retrouvés et 14 personnes ont été sauvées d’une mort certaine après le naufrage de leur bateau.
De nombreux voyages ont également été couronnés de succès: le 6 octobre, la presse espagnole a rendu compte de 5 bateaux en provenance d’Algérie qui sont arrivés indépendamment les uns des autres sur la côte de Carthagène en un jour.[51] Les évolutions futures des départs d’Algérie restent à observer.
Le 24 septembre, le naufrage d’un bateau parti d’Algérie avait donné lieu à des accusations ridicules et terribles sur les survivant.e.s par la justice espagnole:
Ayman, 11 ans, s’est noyé lorsque le bateau sur lequel il voyageait, tentant d’atteindre l’Espagne s’est retourné – les 6 adultes à bord, des ressortissant.e.s algérie.nne.n.s, ont survécu, dont un parent. Les voyageu.se.r.s ont signalé que le mouvement constant des bidons d’essence avait provoqué l’accident et qu’ils n’avaient pas de gilet de sauvetage. Cela a entraîné la noyade du petit garçon, qui ne savait ni nager ni supporter les assauts de la mer comme les autres, qui se sont accrochés aux bouteilles et au bateau jusqu’à l’arrivée des équipes de secours. Incroyablement, après cette horrible tragédie, les adultes sont maintenant poursuivis pour «homicide inconsidéré»! La police les a transférés au Centre d’internement pour étrangers (CIE) de Sangonera (Murcie) – le jugement reste à voir.[52]
3 Externalisation du contrôle aux frontières: coopération politique
L’Espagne et le Maroc vivent un moment de collaboration et d’entente qui a rarement été observé ces dernières années. Depuis la première réunion entre le ministre espagnol de l’Intérieur, Grande-Marlaska, et son homologue marocain, Abdeluati Latfit, en juin 2018, plusieurs événements importants ont eu lieu qui ont permis d’améliorer la coopération. Au cours des 14 derniers mois, les deux chefs de l’Intérieur et leurs ministères se sont réunis à sept reprises au total.
Le facteur le plus déterminant pour l’amélioration de la collaboration est l’aide constante et substantielle fournie par l’Union européenne, accordée après l’insistance de l’Espagne à Bruxelles: 140 millions d’euros ont été approuvés, dont 26 millions d’euros déjà versés par l’Espagne, avec une enveloppe supplémentaire de 32,3 millions d’euros mise de côté en août par le Gouvernement espagnol pour le Maroc afin de renforcer le contrôle aux frontières. Il ne s’agit que de la partie visible de l’énorme flux financier de l’UE vers le Maroc: dans le cadre du Partenariat Européen de Voisinage (PEV), le Maroc a reçu depuis 2014, 236 millions d’euros pour le renforcement de ses frontières.[53][54]
Outre les avantages financiers, le Maroc utilise sa position d’acteur clé au sein du régime des frontières de l’UE pour garantir le silence concernant son annexion illégale du Sahara occidental et pour défendre d’autres intérêts nationaux.
Selon Grande-Marlaska, les arrivées sur les côtes espagnoles ont été réduites de 45% cette année.[55]Lors de sa dernière rencontre avec son homologue, il a remercié le Maroc pour sa “loyauté” et ses “efforts énormes” pour mettre un terme à l’arrivée de bateaux sur les côtes espagnoles.
Le roi espagnol, Philippe VI, a également remercié le roi du Maroc, Mohammed VI, lors de sa réunion de février, du succès remporté par le Maroc dans la maîtrise de la migration vers l’Espagne. Selon le gouvernement marocain, plus de 57 000 départs vers l’Espagne ont été contrecarrés par les forces marocaines et une centaine de «réseaux de trafiquants d’immigré.e.s» ont été démantelés.[56]
Les conditions illégales et les violations des droits sur lesquelles se fonde ce “succès” sont tout simplement occultées ou tolérées silencieusement par les autorités européennes. Violence physique et même assassinat – nous avons décrit ci-dessus le meurtre d’Anssou Keita par un officier de police le 7 septembre au cours d’un raid – arrestations illégales et expulsions totalement arbitraires – histoire des deux hommes de la Côte d’Ivoire, déportés accidentellement au Mali (voir ci-dessous) – sont menées par les mêmes autorités qui sont félicitées pour leurs actions. L’AMDH en parle dans son message facebook[57]:
4 Naufrages et personnes disparues
Du début de l’année 2019 jusqu’au 7 novembre, 417 personnes se sont noyées dans la région de la Méditerranée occidentale et sur la route menant aux îles Canaries. Ce sont les chiffres recensés par le projet Migrants Disparus. Il est plus que probable que d’autres personnes sont mortes sans laisser de trace.[58] Dans l’ensemble de la mer Méditerranée (plus la route des Canaries), 1183 décès ont été enregistrés. Comme les autres régions ont connu cette année beaucoup plus de passages que la Méditerranée occidentale, ces chiffres montrent que les passages entre le Maroc et l’Espagne sont extrêmement dangereux. Un danger aggravé par la réduction des moyens de sauvetage sur cette route.[59]
Le 2 août, un corps mort a été retrouvé dans les eaux de Ceuta par la Guardia Civil.[60]
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Le 29 août, 33 personnes ont tenté de se rendre aux Canaries avec un canot pneumatique. Le bateau a chaviré et seulement 9 personnes ont pu être sauvées par la Marine Royale marocaine. Mais sur les 24 passag.ère.er.s portés disparu.e.s en mer sans laisser de trace, un seul corps a pu être retrouvé. Les autres ont disparu sans laisser de trace.
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Le 3 septembre, seules 2 personnes sur un groupe de 17 personnes embarquées en Algérie en direction de l’Espagne ont pu être sauvées. Le bateau dérivait depuis 5 jours lorsque Salvamento Maritimo les ont trouvé.e.s. 15 ont perdu la vie au cours de ce voyage tragique…[61]
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Le 5 septembre, 4 jeunes Marocains du Rif ont quitté la plage de Bouyafar, près de Nador, pour se rendre à Ceuta / Espagne en jet ski. Ils ne l’ont jamais atteint et ont disparu.[62]
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Le 16 septembre, un bateau a coulé près d’Oran, en Algérie. Sur les 16 personnes à bord, seules 8 ont survécu, 5 sont toujours portées disparues, 3 cadavres ont pu être retrouvés.
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Le 18 septembre, un corps d’un homme subsaharien a été retrouvé sur la plage de Bouyafar / Nador.
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Le 18 septembre, il a été confirmé que 9 personnes étaient décédées et 4 autres portées disparues dans un naufrage au large des côtes algériennes, près du cap Djinet. Seulement 5 personnes ont survécu à la tragédie.[63]
Le 24 septembre, Ayman, 11 ans, de Mostaganem, en Algérie, s’est noyé lorsque le bateau dans lequel il tentait de rejoindre l’Espagne a chaviré. Les 6 adultes à bord ont survécu, dont un membre de la famille.[64]
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Le 25 septembre, une personne a été retrouvée morte dans un bateau en train de couler au large de Tipaza, en Algérie, et une personne a été portée disparue. 6 survivant.e.s ont été sauvé.e.s.[65]
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Le vendredi 27 septembre, une personne s’est noyée au large de Tenes, en Algérie, alors que les 5 autres voyageu.se.r.s ont été sauvés.[66]
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Le 28 septembre, il a été confirmé que 18 personnes étaient décédées et 35 autres portées disparues dans un naufrage près de la côte de Mohammedia, dans l’ouest du Maroc.[67]
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Le 28 septembre, le cadavre d’un enfant de 10 ans a été récupéré au large d’Oran, en Algérie.[68]
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Le 4 octobre, un enfant de 6 ans est décédé au cours de la traversée en bateau de la mer d’Albóran qu’il avait commencé avec sa mère et 64 autres passag.ère.er.s, tou.te.s originaires d’Afrique subsaharienne. Le navire a été détecté par un ferry et sauvé par un actif de Frontex. L’enfant est décédé lors du sauvetage d’urgence à Alméria en hélicoptère.[69]
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Le 11 octobre, deux corps ont été rejetés sur la côte d’Oum Lbair, un enfant et un adulte d’origine subsaharienne.
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Le 27 octobre, un ressortissant algérien est mort dans la mer d’Alboran lors du sauvetage du bateau par Salvamento.[70]
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Le 29 octobre, naufrage d’un bateau transportant 34 passag.ère.er.s, 4 personnes sont décédées alors qu’elles tentaient d’atteindre les îles Canaries, une autre personne est toujours portée disparue.[71]
Footnotes:
[1] https://scholar.colorado.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1002&context=media_ugrad
[2] https://freedomhouse.org/report/freedom-world/2019/morocco
[3] https://data2.unhcr.org/en/documents/download/72041
[4] https://data2.unhcr.org/en/situations/mediterranean/location/5226
[5]https://www.infomigrants.net/fr/post/19256/pres-de-200-migrants-secourus-par-les-garde-cotes-espagnols-en-mediterranee?
[6]https://www.europapress.es/andalucia/noticia-trasladan-puerto-algeciras-cadiz-55-personas-motril-granada-60-dos-pateras-20190922122518.html
[7]https://www.europapress.es/epsocial/migracion/noticia-300-migrantes-cuatro-ellos-muertos-llegan-costas-espanolas-menos-24-horas-busca-desaparecido-20191029135430.html
[8]https://data2.unhcr.org/en/situations/mediterranean/location/5226
[9]https://www.europapress.es/illes-balears/noticia-llegan-puerto-alcudia-18-migrantes-rescatados-aguas-espanolas-20190902142850.html
[10]https://www.europapress.es/illes-balears/noticia-trasladan-peninsula-57-migrantes-llegados-baleares-patera-miercoles-20190920184601.html
[11]https://www.europapress.es/illes-balears/noticia-diputados-senadores-pp-preguntan-gobierno-recursos-destinados-politicas-inmigracion-baleares-20190919144518.html
[12] http://www.statewatch.org/analyses/no-345-sar-spain-morocco.pdf
[13] https://elpais.com/politica/2019/03/26/actualidad/1553613053_040695.html
[14] http://www.statewatch.org/analyses/no-345-sar-spain-morocco.pdf
[15] https://alarmphone.org/fr/2017/03/27/arrestations-massives-au-nord-du-maroc-nos-amis-en-prison/
[16] Quelques semaines plus tard, nous apprenons que l’homme est retourné au Sénégal.
[17]https://www.huffpostmaghreb.com/entry/a-rabat-un-americain-raconte-comment-il-a-ete-pris-pour-un-migrant-arrete-et-expulse-a-beni-mellal_mg_5d695080e4b02bc6bb3902ab?ncid=other_facebook_eucluwzme5k&utm_campaign=share_facebook&fbclid=IwAR0zANoRMdsPjqKQm8XBgs3S_FizJnTzqOpVF8pGZvosMDL26NKmJ46wvUk
[18]https://www.europapress.es/andalucia/cadiz-00351/noticia-salvamento-maritimo-busca-patera-dos-inmigrantes-aguas-estrecho-gibraltar-20190905094055.html
[19]https://www.europapress.es/andalucia/cadiz-00351/noticia-rescatan-patera-estrecho-cadiz-59-personas-bordo-ellas-51-menores-20190803111949.html
[20] https://elfarodeceuta.es/activistas-denuncian-guerra-subsaharianos-marruecos/
[21]https://www.infomigrants.net/fr/post/19425/mort-d-un-migrant-guineen-au-maroc-apres-une-intervention-policiere?fbclid=IwAR2v4gzDNndFi1pVwts60W1v14p1O0L_znwGWfTtNIAZK4ltcme7k6RFllk
[22] https://www.elmundo.es/cronica/2019/09/20/5d82058321efa0d77f8b45f8.html
[23] https://www.facebook.com/AmdhNador/photos/a.1693125780899690/2417339691811625/?type=3&theater
[24]https://www.europapress.es/andalucia/almeria-00350/noticia-guardamar-caliope-navega-malaga-132-personas-recogidas-mar-primer-rescate-65-migrantes-20190828214941.html
[25]https://www.europapress.es/andalucia/almeria-00350/noticia-rescatada-patera-67-varones-diez-mujeres-dos-menores-aguas-mar-alboran-20190909184254.html
[26]https://www.europapress.es/andalucia/noticia-rescatados-80-migrantes-cinco-menores-dos-pateras-navegaban-aguas-mar-alboran-20190917093001.html
[27] https://www.europapress.es/epsocial/migracion/noticia-descienden-mas-mitad-llegadas-migrantes-patera-espana-2019-repuntan-canarias-20191031173328.html
[28]https://www.europapress.es/epsocial/migracion/noticia-llegada-migrantes-patera-sigue-descendiendo-ya-son-mitad-entraron-2018-20190916154025.html
[29] https://data2.unhcr.org/en/situations/mediterranean/location/5226
[30] https://data2.unhcr.org/en/documents/download/71891
[31] https://elpais.com/politica/2019/09/19/actualidad/1568909661_678842.html
[32]https://www.europapress.es/ceuta-y-melilla/noticia-trasladan-melilla-patera-63-personas-ellas-41-mujeres-15-bebes-llegar-islas-chafarinas-20190825135207.html
[33]http://www.ariffino.net/nador-live/%d8%a7%d9%86%d9%82%d9%84%d8%a7%d8%a8-%d8%b2%d9%88%d8%b1%d9%82-%d9%85%d9%86-%d9%86%d9%88%d8%b9-%d8%b2%d9%88%d8%af%d9%8a%d8%a7%d9%83-%d8%a8%d8%b4%d9%88%d8%a7%d8%b7%d8%a6-%d8%a3%d8%b1%d9%83%d9%85?fbclid=IwAR3eR3-dJ3xEbSGXLWycY7yk2dURt2U4XLX_9DiPEly8lTfI1Eb0po9ZWYI
[34] https://elfarodeceuta.es/entrada-masiva-inmigantes-benzu/
[35]https://www.ceutaactualidad.com/articulo/inmigracion/guardia-civil-devuelve-marruecos-migrantes-habian-pisado-suelo-espanol/20190830111605089501.html?fbclid=IwAR3uq5aQyuc62kqF-iIz1KtFVAfl5ZLaMiSeueWLeOdqjYoeB8hiehZSH1E
[36] https://elfarodeceuta.es/entrada-masiva-inmigantes-benzu/
[37] https://www.eldiario.es/desalambre/Gobierno-devuelve-Marruecos-personas-Ceuta_0_806669795.html
[38] https://elfarodeceuta.es/devolucion-subsaharianos-espera-interior/
[39] https://elpais.com/politica/2019/08/16/actualidad/1565970321_912408.html?rel=mas
[40] https://elpais.com/politica/2019/09/04/actualidad/1567602021_280156.html
[41]https://www.lavanguardia.com/politica/20190913/47318269890/vox-muro-ceuta-melilla-policias-pistolas-electricas.html?fbclid=IwAR0Or-LoDa1_6cvrkfZI0RMb2VFobHMq_JcttXrwCDcoqWe6cZXawfEfF9A
[42]https://www.lavanguardia.com/vida/20190925/47631523022/procesados-16-guardias-civiles-homicidio-imprudente-playa-tarajal.html
[43] https://www.eldiario.es/desalambre/Gobierno-absolucion-guardias-procesados-Tarajal_0_948406198.html
[44] http://www.rtve.es/noticias/20191015/primera-condena-nueve-inmmigrantes-organizar-salto-masivo-valla-ceuta/1981807.shtml
[45] https://www.lavozdelsur.es/critican-la-condena-a-9-inmigrantes-por-saltar-la-valla-de-ceuta-su-objetivo-es-imponer-un-castigo-ejemplarizante/
[46] https://elforodeceuta.es/un-residente-del-ceti-trasladado-al-hospital-tras-un-intento-de-suicidio/
[47] https://www.bladi.net/mineurs-marocains-espagne,59304.html?fbclid=IwAR3yrZDdmLvOPEIGBNGAl5Hc88oE_98sZB9KQaf2xrib3gsTYPYnD4OqpkM
[48] https://www.facebook.com/AmdhNador/posts/2418900388322222?__xts__[0]=68.ARBSi-FO2IaMkYkUPa8f5KrcBJnZizZ5LGLN_m-vbfa69fFvP9fXGd_1h6Gsn1tNeZvyZF2yAT3ZPG8CaExDJRqZCWlmcKiSsqW3EOpqdKT03grK0U-hxBLEZQLF5JxwhT1d7WDZn4kFmpzCLWtYue7e5E7oBkpNsFbhoDHgMVqrlJ0iotgew-kzIkNdurxMOArCzqKqA1hWe9lLO1ZMKG0rsB9LzFGY3KnGDiFE7xHIx1CNpzym5hL8DPi_bAzzkKAIlrb57ci5E-n_MoTRXBS3Ead6FmqGWQt5RR1KUFzA6Rg3zO7tkSXPbp2aJO41Rhf1pQgPzbBptl5jzmlap2dIE0VE&__tn__=-R
[49] https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=2377474059013220&id=100002519468022
[50]http://fr.le360.ma/societe/maroc-algerie-ouverture-provisoire-ce-25-septembre-du-poste-frontalier-zouj-bghal-voici-pourquoi-199028
[51] https://www.europapress.es/murcia/noticia-eleva-cinco-numero-pateras-llegadas-costas-region-ultimas-horas-20191006100434.html
[52] https://www.laverdad.es/murcia/cartagena/juzgado-investiga-seis-20191004004506-ntvo.html
[53] De plus, le Maroc bénéficie depuis 2014 d’un soutien de plus d’un milliard d’euros pour son développement sociopolitique, par exemple dans les secteurs de la santé, des affaires sociales et dans les processus de démocratisation.
[54] https://eeas.europa.eu/sites/eeas/files/western_med_route-rev.pdf
[55] https://elpais.com/politica/2019/09/04/actualidad/1567602021_280156.html
[56] https://www.elmundo.es/cronica/2019/09/20/5d82058321efa0d77f8b45f8.html
[57] https://www.facebook.com/AmdhNador/photos/a.1693125780899690/2406450332900561/?type=3&theater
[58] https://missingmigrants.iom.int/region/mediterranean
[59] https://missingmigrants.iom.int/region/mediterranean?migrant_route%5B%5D=1376&migrant_route%5B%5D=1377&migrant_route%5B%5D=1378
[60] https://elfarodeceuta.es/guardia-civil-recupera-cadaver-aguas-desnarigado/
[61]https://www.europapress.es/andalucia/almeria-00350/noticia-rescatados-dos-varones-patera-naufragada-aguas-almeria-habrian-desaparecido-15-personas-20190903172727.html
[62]https://elfarodeceuta.es/inmigracion-rifenos-desaparecidos-moto-agua/?fbclid=IwAR0PckDb-y9_CdJCR9Ggv4iqMIu5RDING-Ex1FsmRmHkaOio73T5TFBWpcc
[63]https://www.elwatan.com/edition/actualite/4-harraga-meurent-noyes-en-mer-et-9-autres-sont-portes-disparus-19-09-2019
[64] https://www.laverdad.es/murcia/cartagena/juzgado-investiga-seis-20191004004506-ntvo.html
[65] https://www.tsa-algerie.com/le-corps-dun-harraga-repeche-et-un-autre-porte-disparu-au-large-de-tipaza/
[66]https://www.tsa-algerie.com/emigration-clandstine-un-cadavre-repeche-cinq-harragas-sauves-et-116-interceptes/
[67]https://www.moroccoworldnews.com/2019/09/283743/moroccan-police-retrieve-12-bodies-of-migrants-near-casablanca/amp/
[68] https://www.observalgerie.com/actualite-algerie/haraga-corps-enfant-10-ans-repeche-oran/
[69] https://www.elindependiente.com/sociedad/2019/10/04/muere-nino-viajaba-patera-alboran/
[70]https://www.europapress.es/comunitat-valenciana/noticia-sucesos-veinte-menores-93-personas-rescatadas-ellas-fallecida-alta-mar-domingo-20191028083327.html
[71] https://www.europapress.es/epsocial/migracion/noticia-300-migrantes-cuatro-ellos-muertos-llegan-costas-espanolas-menos-24-horas-busca-desaparecido-20191029135430.html