38 personnes en situation de détresse urgente laissées près de 24 heures en mer - Les gardes-côtes n'ont pas réagi.

Le jeudi 31 août, le réseau Alarm Phone a été contacté par les passagers d’un bateau en détresse avec à bord 38 personnes, dont 7 femmes. Ils étaient partis d’Assilah, ville de l’ouest de la côte marocaine, à 4 heures du matin. Leur moteur a bientôt cessé de fonctionner et ils ont commencé à dériver vers le sud. À 11h du matin, les passagers nous ont demandé d’alerter les services espagnols de secours en mer. Moins d’une heure plus tard, la situation dans le bateau était si grave que les passagers ont demandé à Alarm Phone d’informer aussi la Marine royale marocaine. Nous l’avons fait à 11h45. Ni les autorités marocaines ni les autorités espagnoles n’ont réagi, alors même que les passagers étaient dans un haut niveau de détresse, et que la position GPS du bateau était connue.

Les 38 voyageurs ont attendu des heures, sous un soleil brûlant, beaucoup d’entre eux malades, dans leur embarcation incapable d’aller de l’avant. La Marine royale marocaine ayant refusé de nous parler et n’ayant donné aucun signe de réaction, nous avons relancé à 13h30 les garde-côtes espagnols par courrier électronique : « Le bateau est toujours en détresse et nous n’avons reçu aucune confirmation du Maroc d’une opération de sauvetage, ni même de recherche du bateau. Les gens sont en danger. S’il vous plaît, envisagez d’intervenir du côté espagnol. » Les autorités espagnoles ont refusé d’intervenir, les autorités marocaines nous ont transmis un numéro de téléphone après l’autre mais n’ont toujours pas envoyé sur les lieux de bateau de sauvetage.

Vers 15 heures, nous avons décidé de diffuser plus largement l’information sur ce cas de détresse. Nous avons contacté le HCR en Espagne et au Maroc, et fait passer le message dans divers réseaux, y compris d’autres organisations comme CEAR et APDHA, demandant une aide urgente et que ces réseaux fassent pression pour que le sauvetage ait lieu. Nous avons envoyé l’appel de détresse urgente via WhatsApp, Twitter et Facebook, et de nombreux groupes et personnes ont contribué à faire circuler l’information. Cela a, enfin, été couronné de succès. À 20h, Les garde-côtes espagnols de Salvamento Marítimo ont envoyé un hélicoptère pour repérer l’embarcation, qu’ils ont trouvée à 21h00. Ils ont ensuite informé la Marine marocaine. À 22h30, ils ont déclaré qu’ils allaient commencer l’opération de sauvetage. Les personnes à bord du bateau attendaient toujours…

À 23h21, la panique a gagné les passagers, parce que l’embarcation, en caoutchouc, perdait beaucoup d’air. Ces 38 personnes souffraient par ailleurs d’avoir passé plus de 19 heures en mer sans aucune aide. Nous avons encore une fois réclamé aux garde-côtes espagnols que soient organisés les secours. Ils ont dit qu’une opération de sauvetage était lancée, et envoyé un bateau dont nous avons pu suivre l’itinéraire vers Assilah à travers la plate-forme de suivi des navires Marine Traffic. Cependant, nous avons vu ce navire de Salvamento Marítimo soudain rebrousser chemin et refaire route vers l’Espagne. À 00h00, nous avons reçu l’information selon laquelle les passagers étaient en train d’être secourus par la Marine royale marocaine.

Nous dénonçons la coopération transnationale menée à la frontière sud de l’Europe, qui joue avec la vie de nombreuses personnes et transgresse la réglementation sur le sauvetage en mer.

Dans le cas décrit ici, il est évident que la Marine Royale marocaine comme les services espagnols du Salvamento Marítimo ont tardé à réagir et cherché à éviter de procéder à une opération de sauvetage, obligeant les passagers à rester 20 heures dans une situation de détresse urgente. Alors que les possibilités et moyens concrets de secours étaient là, aucune des équipes dédiées au sauvetage n’a réagi avant minuit. Le délai mis dans le lancement des opérations de sauvetage aurait pu entraîner la mort de 38 personnes.

 

De même qu’avec l’accord entre l’Italie et la Libye, les moyens de « sauvetage » sont utilisés non pour sauver des vies, mais afin de renvoyer et contenir les migrants sur la rive sud de la Méditerranée.

Nous voulons des ferries pour tous et la liberté de mouvement pour tout le monde !